L'église Notre-Dame-de-l'Assomption d'Arques-la-Bataille
Lorsqu’il pénètre dans l’église Notre-Dame de l’Assomption d’Arques-la-Bataille, le visiteur ne peut qu’être surpris par l’organisation interne de l’édifice : une nef relativement basse et sombre, couverte d’une voûte de bois, impose de tourner le regard vers un chœur aux hautes voûtes, qu’une vive lumière emplit avec abondance.
La plus notable caractéristique de ce chœur est d’avoir conservé sa clôture et son jubé. Jusqu’au XVIe siècle, on considérait comme normale cette stricte séparation d’un espace réservé aux clercs, et il faut imaginer que les trois arcades de ce jubé étaient alors fermées par des retables et des portes, occultant toute vue sur l’intérieur du choeur. Lorsque le Concile de Trente tenta, dans les années 1560, de porter remède aux travers de l’Eglise dénoncés par la Réforme luthérienne, l’ouverture de ces espaces fut vivement recommandée, entrainant la démolition des très nombreux jubés médiévaux. Construit sur le modèle de l’arc de triomphe romain, avec un décor très richement sculpté, celui d’Arques a heureusement été préservé. Il est d’ailleurs à noter que sa construction assez tardive, probablement autour de 1575, peut expliquer qu’on n’ait pas aussitôt décidé de s’en séparer ! L’Académie Bach n’a pas manqué d’user de ce splendide décor pour nombre de ses productions.
Quant à la nef et à ses bas-côtés, tels que nous les voyons aujourd’hui, leurs dimensions et leur relative sobriété résultent de l’impossibilité où se trouvèrent les responsables du vaste chantier de cette église d’en achever le plan tel qu’ils l’avaient prévu, c’est-à-dire avec toute l’élévation et la clarté qu’ils avaient déjà données au chœur et au transept ; dans les années 1580, le désastre et la ruine générale causés par les guerres civiles y firent obstacle. Les recherches historiques divergent sur ce qui fut alors fait, et la question n’est pas tranchée de savoir si nous avons affaire à la nef d’une église plus ancienne, conservée et complétée, ou à une construction nouvelle réalisée à moindres frais.
Dans le chœur et les chapelles, la richesse de la sculpture réjouit l’œil, tout particulièrement au retable du maître-autel dont l’ordonnance se caractérise par six colonnes ornées des scènes de la Passion, voisinant avec des figures appartenant au répertoire symbolique de l’Antiquité tel que la Renaissance l’interpréta.
Les vitraux du chevet, quoique fortement restaurés au XIXe siècle, contribuent au caractère spectaculaire de cet ensemble. Enfin, on trouve dans les chapelles latérales du choeur deux intéressantes verrières du XXe siècle dues à l’atelier Mauméjean, et la splendide verrière de la Passion, sortie de l’atelier Duhamel-Marette en 1886.
La juxtaposition des deux espaces du chœur et de la nef, la combinaison du bois et de la pierre qui s’y trouve, donnent à cet édifice une acoustique remarquable qui a évidemment inspiré la démarche des créateurs de l’Académie Bach.
Philippe Gautrot