Après deux années pleines d’incertitudes, chargées d’angoisse et de peines aussi, la vie semble enfin retrouver un cours qu’on aimerait pouvoir qualifier de « normal ». Cependant, à l’heure d’écrire ces lignes, d’autres inquiétudes viennent obscurcir des temps déjà éprouvants, ravivants des sentiments qui semblaient ne plus appartenir qu’au passé. À la peur d’une maladie planétaire succède celle d’une guerre aux portes de l’Europe, dont l’idée même nous stupéfie. Dans ces moments graves, la culture ne devrait-elle pas rester silencieuse et attendre le retour à des temps meilleurs ?
Mais c’est le contraire, je crois, qui doit s’imposer. Maintenir la culture vivante dans ce monde effrayant, c’est ce qui nous permet de penser encore que nous sommes humains, ici et maintenant. Certainement pas comme un écran de fumée euphorisant qui cacherait le réel derrière des rires et des chansons, mais bien plus comme un regard sur nous-mêmes, sur le monde qui nous entoure et que nous souhaitons meilleur, pour nous souvenir que nous portons en nous les forces et les faiblesses d’un être pensant.
C’est dans cette perspective que l’édition 2022 du Festival de Musique Ancienne en Normandie a été conçue, comme une aide à la résilience dont nous avons tant besoin. En 1944, Georges Duhamel (médecin, écrivain, académicien, résistant et passionné de musique) fit paraître La Musique consolatrice, un petit livre qui affirmait que l’art musical restait toujours un soutien fidèle, une source d’espoir, même dans les pires moments. Il y attribuait aussi une place toute particulière à Bach, artiste visionnaire capable, par son langage musical, de porter l’esprit humain à une forme d’élévation, voire de transcendance.
Bach sera donc plus présent que jamais dans notre programmation. À travers des extraits de cantates recomposées par Saskia Salembier et Marc Meisel lors des rendez-vous matinaux de 11 heures. Par la découverte de possibles concertos pour orgue et orchestre, reconstitués par Bart Jacobs, qui nous a tous éblouis ces dernières années lors des concerts avec Vox Luminis. Par l’émerveillement que procure l’écoute de L’Offrande Musicale, composée sous l’impulsion du roi de Prusse Frédéric II, que Les Musiciens de Saint-Julien joueront en concert pour la première fois. Et puis encore à travers ce chef-d’œuvre absolu que sont les Variations Goldberg, dont nous chercherons à percer les mystères sous les doigts de Jean-Luc Ho.
Nous aurons l’immense plaisir de retrouver Claire Lefilliâtre dans des airs de cour du XVIIe siècle et d’accueillir pour la première fois l’ensemble Correspondances, nouvellement implanté en Normandie, dans un superbe programme de cantates sacrées de Bach et Buxtehude. Enfin, un concert de l’ensemble La Chacana, consacré à la musique sud-américaine du XVIe siècle, nous conduira dans le Nouveau Monde pour comprendre les implications artistiques de la colonisation espagnole.
Encore quelques mots : ce programme n’est pas exactement celui qui avait été annoncé il y a quelques semaines. N’ayant pu organiser les Journées des Claviers Historiques initialement prévues au début du mois de juin, nous avons pris la décision d’en intégrer intégralement la programmation à l’intérieur du festival d’été. Vous retrouverez donc Andreas Staier, Olga Pashchenko, Jean-Luc Ho et Rémy Cardinale dans une série estampillée « claviers historiques » qui nous permettra d’explorer de nouveaux horizons esthétiques.
Bref, un festival conçu « à l’intention des amateurs, pour la récréation de leur esprit », ainsi que l’écrivait Bach lui-même en page de titre des Variations Goldberg, qui sera aussi l’occasion d’un hommage à Gustav Leonhardt, disparu il y a maintenant dix ans.
Vous remarquerez que nos tarifs ont changé. La création de plusieurs catégories a été nécessaire, en correspondance avec la réalité des coûts artistiques, y compris pour les concerts de 11h, afin de maintenir la densité et le niveau d’exigence du festival. Nous avons été particulièrement attentifs au fait que les adhérents de l’Académie Bach doivent continuer à bénéficier de conditions très favorables. La gratuité pour les moins de 18 ans est maintenue, de même que le tarif réduit pour les demandeurs d’emploi, les moins de 25 ans et les stagiaires de l’Académie Bach. Je sais que vous comprendrez les raisons qui nous ont conduits à ces adaptations et je vous en remercie.
Jean-Paul Combet
TARIFS
Tarif A 28 € adhérent / 35 € tarif plein
Tarif B 23 € adhérent / 30 € tarif plein
Tarif C 18 € adhérent / 25 € tarif plein
Tarif D 7 € adhérent / 10 € tarif plein
Pour tous les concerts :
Tarif réduit (demandeurs d’emploi, 18-25 ans, élèves du Conservatoire Camille Saint-Saëns de Dieppe) 10 €
Gratuité pour les moins de 18 ans et le personnel du Conservatoire Camille Saint-Saëns de Dieppe.